07.07.2015

La transformation digitale : un long parcours de découverte

Author: Bertrand Duperrin

La transformation digitale tout le monde ou presque a compris que c’était important et ce même si nombre d’études montrent l’écart qu’il existe encore entre les ambitions affichées et la réalité. Justement, à mon avis, parce qu’entre avoir l’ambition de s’engager dans le processus de transformation et commencer à s’organiser pour se transformer il y a une phase pas forcément évidente. Notamment pour ceux qui aimeraient une solution toute faite, quelque chose à mettre en œuvre tout de suite et qui serait visible en quelques semaines.

Il faut apprendre à regarder une situation connue depuis un autre point de vue.

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La question à laquelle doivent répondre les entreprises est “qu’est ce que ça veut dire pour moi, qu’est ce que cela va changer dans mon business ?”. Il n’y a pas de réponse toute faire qui sortirait par magie d’un powerpoint ou du cerveau d’un génie. Cette réponse il faut la construire et la choisir car plusieurs futurs sont possibles. Il faut alors décider d’en choisir un.

Savez vous déjà quel sera votre secteur d’activité demain ?

Si cela peut sembler simple de prime abord, c’est beaucoup plus compliqué dans la réalité. A commencer par savoir quel est le métier de votre entreprise.

Si vous partez du principe que vous êtes un constructeur automobile et que vous vendez des voitures dans des concessions vous avez déjà une vision trop restrictive du champ des possible et avez déjà au moins un pied dans l’erreur.

Idem si vous vous dites que vous vendez des assurances et indemnisez les sinistres.

Idem si vous vous dites que vous distribuez du courrier.

Idem si vous vous dites que vous vendez des produits alimentaires à des grandes surfaces.

Comme le disait le CEO Survey 2015 de PWC la plupart des entreprises vont changer de secteur d’activité ou s’étendre sur des secteurs adjacents au leur. Et ils s’attendent tous à voir surgir leurs futurs concurrents d’autres secteurs, notamment du secteur des technos.

Bref il va falloir désapprendre un certain nombre de choses avant de pouvoir “bien” penser à l’avenir. Oublier des choses qu’on croyait acquises et acquérir un nouveau mode de pensée. Ce qui est loin d’être quelque chose qui arrive en un claquement de doigts, à la sortie d’une réunion, quelque chose qui se décrète comme on passerait un bouton de “on” à “off”. C’est un processus d’acculturation et de découverte, ce qui implique un certain nombre de choses :

Il faut désapprendre avant de réapprendre

– Il faut du temps. On ne construit pas sa stratégie de transformation en deux jours et trois workshops.

– Cela passe par des interactions. On apprend en regardant mais également en interagissant avec d’autres, avec ceux qui l’ont déjà fait et réussi.

– Cela passe par l’acquisition active de savoirs, comportements et réflexes. Ce qui demande implication et participation.

– C’est quelque chose qu’une direction générale ne peut déléguer. Sinon elle ne sera pas en mesure de comprendre les propositions surement disruptives qui seront faites et donc de les incarner et les appuyer.

Ca n’est qu’à ce prix que l’entreprise sera en mesure de vraiment comprendre son nouveau terrain de jeu et penser sa transformation en fonction de lui et non de l’ancien.

Bref on ne transformera pas que l’entreprise mais également les individus et il est essentiel d’ailleurs de commencer par eux. D’abord la direction et ensuite les collaborateurs, dans cet ordre. En effet lorsqu’on voit la variété des initiatives pédagogiques que les entreprises les plus en avance mette en œuvre à destination de leurs collaborateurs il faut bien avoir conscience que de tels dispositifs n’auraient surement jamais été validés et financés si la direction n’avait pas fait un travail sur elle-même auparavant.

Le learning est au cœur des démarches de transformation digitale

Un état des lieux qui pourrait sembler évident mais ne l’est finalement pas tant que ça. A l’inverse d’un projet traditionnel on sort du séquencement analyse/planification/exécution pour passer à acculturation/innovation/planification/exécution ce qui peut s’avérer contre-nature dans nombre d’organisations pour au moins trois raisons

• On démarre par une phase de learning pour une population qui est en général considérée comme sachante et a davantage l’habitude de faire apprendre aux autres.

• On ne sait pas combien de temps cette phase de learning prendra (même si on peut tout de même mettre des limites)

• On ne sait pas a priori toujours quels sujets émergeront ni à quel rythme le processus d’innovation produira des idées.

Une dose d’inconnue et d’incertitude qu’il faut savoir accepter si on ne veut pas prendre le problème du digital à l’envers car l’enjeu est bel et bien de faire avancer le train tout en posant les rails en même temps. Ce qu’il faut apprendre des autres n’est pas tant ce qu’ils ont fait afin de le copier mais la raison pour laquelle ils l’ont fait afin de trouver son propre modèle de réflexion et apporter sa propre réponse.

Suivre les leaders est dangereux. Il faut trouver sa propre voie.

Une approche indispensable pour

• formuler une vision

• formuler une vision qui soit propre à l’entreprise. Comme le disait McKinsey dernièrement, suivre les leaders est dangereux, et j’ajouterai que copier ce qu’ils vont sans avoir compris le pourquoi et refaire le chemin en fonction de son propre pourquoi

• communiquer cette vision aux collaborateurs pour à leur tour les faire rentrer dans une démarche d’acculturation à même de diffuser un niveau minium de culture digitale partagée qui permettra de faire de l’innovation digitale (qu’elle concerne les produits, les services, les business models, le management) l’affaire de tous.

En matière de transformation digitale ne commencez pas par “que devons nous faire” mais “comment allons nous nous mettre en condition de trouver ce que nous devons faire”.

 

 

 

 

photo credit: Sud de la Lune via photopin (license)

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