06/24/2010

Libération de la donnée publique : just do it !

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

A l’époque du grand emprunt et de la parenthèse d’intérêt pour les gisements de croissance de notre beau pays qu’il a constitué, RSLN Mag avait posé la question de savoir ce que l’on pouvait bien faire. Je m’étais alors permis de dire que, plutôt que de chercher bien loin, l’Etat et la puissance publique en général était assise sur un colossal gisement de valeur : la donnée publique !

2010, printemps des données ?

Plus personne ou presque ne parle du grand emprunt, mais on parle substantiellement de la libération des données publiques. On en parle parce qu’il y a des initiatives.
On en parle surtout beaucoup en terme d’appropriation citoyenne. Un sujet que j’avais pointé il y a plus d’un an et demi maintenant, avec l’exemple cocasse de la cartographie au Royaume Uni.
C’était aussi l’époque des initiatives de la présidence Obama. Il est vrai que, contrairement à ce qui se passe ici, des progrès sensibles d’utilisation des creative commons avaient été observé alors. Par ici, on les cherche encore …
Bref, le débat semble parti, des gens tournent autour, manque le grand saut !

Quand la donnée privée devient publique, c’est plus formel qu’on ne le pense …

Si on en reparle, c’est aussi en écho avec le débat sur la vie privée et les polémiques suscitées par Facebook. J’ai déjà dis ce que j’en pensais, faisant le lien avec le débat sur la neutralité, car je maintien que tout cela procède d’une question autour de la notion de bien public et de sa régulation.

Il peut paraître étrange de lier de la donnée individuelle avec du bien collectif, mais quand la donnée personnel forme des gisements à l’échelle de la nation, cela intéresse la collectivité il me semble. La CNIL a été créé pour ça il y a plus de vingt ans. Et quand je lis Denis Latour dire chez InternetActu que le digital ne dématérialise pas mais au contraire rend matériel l’immatériel, on en a là un bel exemple …

C’est donc bien plus concret qu’on ne le pense. Pour l’instant, la masse semble ne pas prendre ce sujet au sérieux. Il appartient à une sphère militante qui agite la paranoïa et qui allume des initiatives parlementaires qui font rire jaune.

Les gisements de valeur économique de la donnée publique

J’aime à me souvenir des projets inassouvis de l’e-administration du début de ce siècle, quand elle voulait centraliser nos données d’administrés dans une grande base de données et qu’elle s’entendait dire que ça marcherait mieux en P2P et en laissant les données chez les gens. C’était il y a dix ans et cela me fait donc sourire de lire ce qu’on peut écrire autour de Facebook et Diaspora. LOL !

Comme vous l’aurez compris, la donnée personnelle s’est libérée de fait et a échappé à l’administration pour mieux tomber dans les bras du marché. Le citoyen consommateur choisit ses maîtres et, s’il est légitime de discuter de régulation, derrière le marché, il y a du business, de la valeur et des emplois de l’économie réelle. Après tout, Viadeo qui est bien français, fait pareil.

La donnée tout court a de la valeur et la donnée publique peut en créer beaucoup.

Nous avions bien ri avec la cartographie au Royaume-Uni, nous avons bien observé que l’IGN faisait des efforts (il est temps !), méditons sur les aventures des archivistes …
Il y a quelques jours, Eco 89 a narré les aventures de genealogie.com, qui se plain d’entraves dans l’accès aux fichiers d’état civils gérés par les archives départementales et qui constituent pour lui un gisement de valeur core-business. On s’amuse de découvrir que la loi donne tort aux Conseil Généraux et que les clés de la libération de la donnée publique existent bien, donc.

Il se trouve que je connais assez bien le petit monde des archivistes départementaux, pour les avoir fréquentés au titre de mes hobbies historico-archéologiques et pour avoir conduit plusieurs chantiers d’archives départementales en ligne. Je sais donc bien que les généalogistes sont le gros de la clientèle de ces institutions. Ils peuplent littéralement les salles de lectures et sont une des causes qui stimule les projets de numérisation. Ils étaient un sujet de réflexion inter-archivistique de savoir s’il fallait les faire payer ou non. Mais tout cela était trop lent et l’économie de la connaissance va plus vite que l’administration, malheureusement pour elle.

Il est cocasse ou pathétique de voir l’Etat et les départements dépenser nos rares deniers à faire ce travail essentiel de numrisation et generalogie.com venir leur démontrer que c’est de recettes dont on pourrait parler et non de coûts.
Il est ridicule de voir des départements refuser l’accès à ces données, ne pas vouloir les vendre à genalogie.com ou à d’autres.
Il est inadmissible, au XXIe siècle, qu’il n’y ait pas de réflexion et de projets concrets de monétisation de ce type de données. Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est illégitime ou qu’on ne sait pas le faire, nous payons tous les jours pour des quantités de biens similaires. C’est même une bonne partie de la recette des municipalités.

Alors, puisqu’on en est à chercher des économies partout, ne pourrait-on pas chercher de l’économie, aussi !

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