06/12/2006

UP FING 2006 4/ un autre monde est en marche

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Cette quatrième UP FING s’est révélée encore une fois très riche, très dense, dans son contenu, ses échanges et ses rencontres. Elle boucle un cycle de quatre années qui avait débuté sur une prospective que les faits de l’EntreNet sont venus contredire et qui révèle un paysage bien plus complexe que nous ne l’imaginions, avec des perspectives qui en appellent à l’humilité.

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Non pas que la “prise de pouvoir” de l’utilisateur n’aie pas été anticipée, mais pas dans la forme les formes que l’on observe. Je met des “s” à dessein, car s’il est une leçon de cette édition, c’est qu’au delà des mécanismes, les choses sont vraiment diverses, fortement dépendantes du contexte et de la culture des hommes et que généraliser est dangereux. Plusieurs fois s’est d’ailleurs posé le besoin d’une nouvelle granularité autour du terme “coopération”. Les outils pour bien modéliser et comprendre les mécanismes de l’EntreNet sont à réinventer.
Dans cet objectif, il nous a été présenté des choses très intéressantes pour comprendre et modéliser les pratiques de masse, la viralité, les phénomènes (plus ou moins) spontanés de mobilisation, la mise en spectacle sur le réseau ou le comment différentes postures de blogging forment des mises en réseaux très variées. Cela va mériter un peu de digestion, mais il fait déjà consensus que la notion de blogopshère n’a plus de sens tellement l’espace semble fait de sphères parfois étanches, dont les modèles sont très différents et les interrelations mobiles. J’ai beaucoup pensé à la mémétique tellement tout cela ressemble à des processus vivants. Enfin, on ne peut raisonner à périmètre défini, ni sans prendre en compte le facteur temps. Tout cela commence à faire beaucoup de variables.
Si “bloguer” est un usage identifié, si le verbe a de l’avenir, “blog” est pour sa part un objet qui semble déjà vieux, en tous les cas banal. Certains se posent d’ailleurs la question de l’avenir du mot. De grosses questions aussi autour de la notion de conversation, où ça commence, où ça fini, de savoir si finalement le terme est-il lui-même approprié à ce dont on parle. Comme pour “coopération”, nous manipulons des instruments dont le sens mérite d’être précisé et affiné.
Enfin, j’ai trouvé que l’on se focalise beaucoup sur les utilisateurs-acteurs, en négligeant la masse de ceux qui ne font que consommer. Cela nous a valu jeudi de relancer le débat critique sur les statistiques d’audience des blogs, la dernière étude médiamétrie, ou encore du bon usage de Technorati et du ranking. Dans tout cela, il y a des progrès à faire.
Derrière l’écrit se trouve l’individu et c’est bien de lui qu’il s’agit maintenant, de la convergence de différentes pratiques d’existence et de partages qui fondent l’internet social. Clairement, l’identité et mêmes les identités sont à mon avis le thème à creuser. Ce qui se passe avec MySpace est à ce titre très intéressant, d’autant plus que ce n’est que le début. La question de la maîtrise de l’identité, sous tous ses sens, est posée.
Comme vous l’avez compris, l’heure n’est plus aux théories fumeuses, mais à la prudence dans le jugement. Derrière l’humilité non feinte de beaucoup d’intervenants face aux usages décrits, je crois surtout qu’il y a la conscience que le changement est maintenant entré dans une phase critique.
Plusieurs exemples ont été soulignés portant en effet sur des scénarios radicaux, des phénomènes de rejet de ceux qui font de la rétention d’information par exemple. On a bien vu aussi comment l’utilisateur peut vraiment prendre le pouvoir et faire de l’espace de coopération sur lequel il évolue un objet qu’il serait vain de vouloir contrôler et dangereux de fermer, au risque que cela se passe carrément en dehors. Les frontières des organisations deviennent floues et poreuses. Le management et le pilotage stratégique doivent évoluer ou subir. Cela n’a fait que me conforter sur mes convictions, avec la sensation qu’on est vraiment au pied du mur. Je pense aussi à l’école et aux universités, institutions face à la vague et qui semblent assez immobiles…
Pour apporter un complément au billet de Christophe, il me semble assez frappant que si la question de l’émergence et des formes de la coopération dans l’internet de masse est posée depuis longtemps et assez bien décrite, son application au sein des organisations est source de profonde incertitudes. Bon, on est clairement en plein dans des sujets qui me sont chers, ceux du changement lié à l’intégration des modèle organisationnels liés à la société de l’information dans des modèles hiérarchique. Mais à l’image d’Euan, je crois qu’il faut rester humble, éviter de tirer des conclusions prématurées, de généraliser et commencer déjà par regarder ce qui se passe. Les choses sont très complexes et sans manichéisme.
Il y a déjà beaucoup d’écueils liés au cadre même d’exercice du métier (un exemple). Ensuite, l’opposition entre organigramme et organisation hiérarchique n’a pas de sens et le prétendu blocage des DSI doit être nuancé. Il y a des choses qui marchent ici et pas là, des utilisateurs qui s’investissent facilement ou non. Les cultures et le métier, le contexte, changent la donne.
Le processus d’intégration de la société est entré dans une phase dure. Plusieurs exemples l’ont souligné et Howard Rheingold l’a affirmé, l’heure est venu de constater que l’ancien monde est face au changement nécessaire, mais il ne faut pas pour autant être angélique et négliger sa faculté de résistance. Je ne peux m’empêcher de relier ce constat avec la DADVSI, mais il est clair que tant dans l’internet de masse que dans les organisations, la question n’es plus de savoir s’il faut ou non engager le changement, mais comment. Ceux qui pensent le contraire, qui pensent en élevant des digues se mettre à l’écart du changement, ceux qui pensent que chez eux c’est différent vont dans le mur. Le reste du monde avancera en contournant leur obstacle.

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