04/10/2005

Vésunna

Author: Romain Dehaudt, Head of Revenue & Operations

Il est des villes dont le riche patrimoine gallo-romain est plus dans les livres ou la connaissance des amateurs que dans le visible, mais qui un jour se donnent les moyens de corriger le tir. C’est ce qui se passe à Périgueux depuis l’ouverture de Vésunna.
La promesse était belle et relayée comme il se doit au plan médiathique (une spéciale “des racines et des ailes” tout de même). En bon amateur d’archéologie et de muséographie, c’est donc avec expectative que je suis allé vérifier sur pièce ce dimanche.


Vesone.jpgVésunna, c’est la muséographie de la Domus des Bouquets, découverte en, 1959 alors que l’on prévoyait, à cet endroit jouxtant l’emblématique tour de Vésone, de construire un ensemble HLM.
Il paraît aujourd’hui ahurissant d’avoir voulu accoler à ce joyaux de la France gallo-romaine un projet de ce type, mais c’est finalement assez symptomatique de l’époque…
Devant la qualité et l’ampleur du site découvert, le projet immobilier fut heureusement abandonné. Contrairement à ce que l’on croît, c’est loin d’être une généralité et les “fouilles” se contentent de ramasser le mobilier (qui fini au fond des dépôts de fouilles) et de dresser relevés et plans pour d’obscurs rapports scientifiques et l’ignorance du public.
La suite est assez emblématique de ce qui se passait et se passe encore pour l’immense majorité des grands sites archéos français : à défaut d’avoir rasé le truc, on ne sait pas trop quoi en faire, donc on ne décide rien et on se donne du temps en distillant les budgets d’études juste comme il faut (…). Dans le cas présent :
– 16 années de fouilles étalées sur 40 ans
– 34 années entre la décision de ne pas détruire et celle de passer à autre chose que des baraquements en tôle.
Je vous le dis tout net, ça valait le coup d’attendre !
Vesuna1.jpgJean Nouvel a su concevoir une architecture simple, sobre, qui s’efface entièrement au profit du site et de sa muséographie.
La domus se présente dans un immense hall de verre ouvert sur les jardins alentour, avec la tour de Vésone et une partie des anciens remparts. Celle-ci baigne donc dans la lumière naturelle.
Les espaces parasites (accueil, boutique…) sont logés dans une barre proposant deux immenses balcons où se trouvent un imposant lapidaire. On bénéficie donc d’une vue imprenable sur les 4000m2 de la domus. Le mètre d’élévation des vestiges, avec notamment de très belles peintures murales, est quand à lui surmonté d’un réseau de passerelles qui restitue la circulation à l’intérieur de la villa et sur lesquelles se distribuent divers espaces thématiques avec juste ce qu’il faut d’information, de mobilier présenté et de maquette. Pas d’indigestion ni d’encombrement.
Vesuna2.jpgLe plan au sol de la villa est reproduit au plafond et comme le réseau de passerelle souligne sa structure, la lecture du monument est des plus simple.
De fait, on évite un parcours linéaire, ce qui permet de circuler selon son goût et à son aise. Comme on surplombe sans arrêt le site, chaque endroit offre un point de vue différent.
Enfin et surtout, la circulation étant calquée sur celle de la domus, on en développe assez rapidement une perception spatiale assez réaliste. Tout ce qu’il faut pour s’y croire un peu.
Cette réalisation m’a fait penser à Argentomagus (Argenton-sur-Creuse), autre grand lieu, mais où le parti pris est celui de la crypte archéologique surmontée du musée, avec un parcours linéaire. Vésunna est plus convivial, on a envie d’y flâner. J’ai vraiment été séduit et je pense que je reviendrai.
En fait, il ne manque qu’une chose à Vésunna, c’est un site web digne de ce nom. Pour l’instant, vous vous contenterez de cette présentation sur le site de la Ville de Périgueux.
Après avoir vu ça, le citoyen limougeaud que je suis ne peux éviter une réflexion. J’invite sérieusement nos élus à aller visiter Vésunna afin de se dire qu’il y a autre chose à faire de l’immense patrimoine gallo-romain de Limoges que les bribes visibles ici ou là. Il serait notamment temps de se décider à faire quelque chose de la domus fouillée puis réensevelie à côté de la Mairie et qui a des proportions et un intérêt aussi grand. Pour ceux qui ne connaissent pas : la pelouse où vient se soulager une partie de la population canine entre la BFM et la nouvelle Fac. de Droit (…)

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